Pacte budgétaire: le changement, c’est pas maintenant

Le Pacte budgétaire ne change rien. Les règles budgétaires sont déjà inscrites dans le droit européen.

En effet, alors que les politiques s’achoppent sur le futur Pacte budgétaire et sa règle d’or budgétaire, les institutions européennes élaborent discrètement deux nouveaux règlements européens (dits « Two-Pack ») visant à renforcer la discipline budgétaire.

Et si le Pacte budgétaire n’était là que pour détourner notre attention des véritables réformes décidées à Bruxelles?

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Suite au dernier Conseil européen, François Hollande a indiqué que le Traité serait rapidement soumis à la ratification de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Comme s’il eu fallu attendre cette déclaration pour comprendre que la majorité socialiste soutiendrait ce texte, de nombreux partis et associations de gauche se sont enfin réveillés pour réclamer un référendum sur un texte considéré comme synonyme d’austérité.

Dommage que ceux-ci n’aient pas eu la bonne idée d’exiger ces garanties avant d’apporter leur soutien à l’élection de François Hollande.

La limitation du déficit structurel et l’obligation de réduction de la dette sont sans conteste les mesures phares du Pacte budgétaire (Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de l’UEM).

Même si le Traité n’impose en rien les moyens d’atteindre ces objectifs budgétaires, les recommandations émanant des institutions européennes vont surtout dans le sens d’une réduction des dépenses. La hausse des recettes, dans un contexte de recherche de compétitivité, n’est pas à la mode.

Puisque référendum il n’y aura, la question qui sera donc posée à nos nouveaux représentants parlementaires est celle de la rigueur budgétaire et de l’assainissement des comptes publiques.

Même s’il on connait déjà le sens du vote du Parti socialiste, je vous propose ici un petit exercice de politique fiction.

Imaginons que les députés de la nouvelle majorité, apercevant l’ange du socialisme dans leur sommeil, aient tout à coup des scrupules à ratifier une règle d’or qu’ils pourfendent depuis des mois.

Pourraient-ils, en refusant de ratifier le Traité, soustraire la France du carcan de la discipline budgétaire?

Pas vraiment.

En effet, la plupart des règles budgétaires évoquées ci-dessus sont déjà inscrites dans les Traités européens(en l’espèce, le Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne, TFUE).

L’obligation de réduire d’un vingtième par an la dette supérieure à 60% du PIB est déjà prescrite par l’article 2 du règlement n°1467/97.

Cette disposition a été introduite l’an dernier, dans l’indifférence générale, par le règlement n°1177/2011 du 8 novembre 2011 (réforme dite du « Six-Pack »).

Quant au déficit structurel, plafonné à 0,5% du PIB par le Pacte, il est déjà limité à 1% du PIB par les Traités européens.

En outre, la réforme du « Six-Pack » a mis en place un « Objectif [budgétaire] à moyen terme » (OMT) défini par la Commission européenne pour chaque Etat.

En France, cet OMT oblige l’Etat à retrouver l’équilibre structurel de ses comptes publics, soit un déficit structurel limité à 0%.

En d’autres termes, le présente Pacte budgétaire n’implique par de mesures budgétaires plus contraignantes pour la France que celles déjà en vigueur au titre du TFUE.

Aussi, le TFUE prévoit également la limitation du déficit (conjoncturel) à 3% du PIB – cette règle ayant été édictée depuis la ratification du Traité de Maastricht en 1992.

L’article 3 du règlement n°1467/97 prévoit enfin que les Etats doivent améliorer chaque année leur solde structurel afin de respecter l’OMT défini par la Commission européenne.

A quoi donc sert le Pacte budgétaire ?

Si le droit européen en vigueur fixe déjà des règles plus contraignantes, ainsi que les sanctions applicables, en matière de discipline budgétaire, à quoi sert le Pacte budgétaire ?

« Comptablement » parlant, le Pacte budgétaire ne sert à rien.

Par conséquent, les Etats européens ne sauraient se soustraire à la discipline budgétaire en refusant de ratifier le Pacte.

C’est « politiquement » que le Pacte budgétaire revêt tout son sens.

En effet, l’intérêt de la règle d’or est de modifier le niveau juridique applicable.

Désormais les règles comptables ne seront plus uniquement inscrites dans les Traités européens mais directement dans le droit national des Etats ratifiant le Pacte.

Tous les textes budgétaires nationaux ne respectant pas les règles budgétaires pourront être sanctionnés, non plus seulement par les institutions européennes, mais également par les juridictions nationales.

L’intérêt du Pacte budgétaire est d’abord et surtout d’obtenir l’aval politique direct des parlementaires nationaux sur des dispositions budgétaires précises. En d’autres termes, de rappeler à la mémoire des députés et sénateurs les obligations que leur Etat s’est engagé à respecter en ratifiant le Traité de Maastricht.

Enfin, même en refusant de ratifier le Pacte budgétaire, les Etats seraient tout de même tenus d’introduire toutes ces règles budgétaires dans leur droit national.

En effet, le règlement établissant des dispositions communes pour le suivi et l’évaluation des projets de plans budgétaires et pour la correction des déficits excessifs dans les États membres de la zone euro, actuellement entre les mains des eurdéputés, prévoit l’inscription dans les « processus budgétaire national » les conditions de respect de l’« objectif budgétaire à moyen terme ».

C’est la règle d’or, non plus inscrite dans un Traité international, mais dans un règlement d’application directe.

Pour plus d’informations, cliquez ici.

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